Mardi 28 juin à 18h, ENS rue d’Ulm, Paris 5e. Table ronde littérature.
À l’occasion du centenaire de la naissance de l’écrivain et ancien maquisard piémontais Nuto Revelli, figure emblématique de la Résistance italienne au nazi-fascisme (voir notre précédent article : Centenaire Nuto Revelli à Paris. Programme d’une découverte 1er juin – 1er juillet 2022), les éditions Rue d’Ulm, la Fondation Nuto Revelli (Cuneo), la Fondation Maison des sciences de l’homme (FMSH) et l’Institut culturel italien de Paris, en partenariat avec la Maison de l’Italie à la Cité universitaire et l’École Normale supérieure, proposent une table ronde autour des éditions françaises récentes des livres de l’écrivain (éditions Rue d’Ulm et Cahiers de l’Hôtel de Galliffet) ou en préparation pour 2022 (éditions Nous à Caen et éditions Ici-bas à Toulouse).
La table ronde autour des livres de Nuto Revelli sera animée par Maurice Aymard, Lucia Carle, Paolo Grossi et Lucie Marignac.
- La Guerre des pauvres (Rue d’Ulm, 2020)
- Les Deux Guerres (Cahiers de l’Hôtel de Galliffet, 2020)
- Le Monde des vaincus (Éditions Ici-bas, Toulouse, à paraître)
- L’Anneau fort (Éditions Nous, Caen, à paraître)
Renseignements pratiques :
Mardi 28 juin 18h – ENS Salle Dussane – 45 rue d’Ulm, Paris 5e
Page de l’événement
Résumé des deux livres déjà parus:
- La Guerre des pauvres de Nuto Revelli (éditions Rue d’Ulm) – 22€ – paru en 2020 – Traduction et annotation d’Angela Guidi et Lucie Marignac – Préface d’Éric Vial
Paru chez Einaudi en 1962 et régulièrement réédité depuis, La Guerre des pauvres fait revivre, à partir du journal tenu par l’auteur, un chapitre héroïque méconnu de l’histoire de l’Italie, depuis la campagne de Russie (il s’engage en juillet 42) jusqu’à la Libération (Cuneo est libérée fin avril 45).
Officier du corps expéditionnaire italien sur le front de l’Est dans la division Tridentina, Revelli raconte l’immense défaite et la retraite tragique qui, à la suite de la contre-offensive russe sur le Don, jettent à travers la steppe gelée des dizaines de milliers d’hommes, dont peu survivront. Après, écrit-il, sa vie ne sera plus la même. Quittant l’armée, il prend les armes dans le maquis des Alpes et mène au jour le jour, comme chef partisan puis en tant que commandant de l’une des brigades antifascistes Giustizia e libertà, un autre combat – contre les détachements mussoliniens de la République de Salò et contre les troupes hitlériennes.
Au fil des jours et des pages de ce livre-vérité s’affirment la cohérence d’un destin individuel, la dignité des humbles pris dans la folie absurde de l’histoire, la force du témoignage sur « la guerre vue d’en bas ». Portées par une prose sèche et abrupte, une écriture blanche de mémorialiste qui s’invente en marchant et en luttant, loin de la rhétorique du combat ou du sentiment.
Entre Le Sergent dans la neige de Mario Rigoni Stern (1953) et La Guerre sur les collines de Beppe Fenoglio (1968), une autre voix s’élève, qui confère à ces antimémoires de guerre la dimension d’une épopée.
- Les deux guerres. Guerre fasciste et guerre de libération (Cahiers de l’Hôtel de Galliffet) -16€ – parution 2020 – Préface de Maurice Aymard – Traduit de l’italien par Vincent d’Orlando
On connaît la formule de Perec à propos de « l’Histoire avec sa grande Hache ». L’écrivain français est aussi l’auteur d’un récit intitulé Je me souviens où il redonne vie aux objets de son enfance. Dans Les deux guerres, Nuto Revelli s’inscrit sous cette double égide en relatant le second conflit mondial à partir de ses souvenirs d’officier de l’armée italienne.
C’est un témoin qui raconte pour dessiner une sorte de cartographie géographique et mentale d’une jeunesse sacrifiée. La force du livre de Revelli tient à son statut de vérité que nul pathos ou jugement moral ne dévie jamais de la volonté principale de l’auteur, exprimée en clôture de l’ouvrage : « Pourquoi ai-je voulu revivre mes années fascistes, mes années de guerre et de résistance ? Parce que je crois en la jeunesse et parce que je veux que les jeunes sachent ».
À la fois journal de bord, enquête, essai d’historien, autobiographie intime et générationnelle, le livre de Nuto Revelli est le pendant documenté et précis d’une tradition du récit de guerre bien ancrée en Italie avec des romanciers tels que Mario Rigoni Stern (Le Sergent dans la neige), Beppe Fenoglio (La Guerre sur les collines) ou Mario Tobino (Le Désert de Libye). Comme eux, Revelli dévoile l’absurdité et la folie d’un système militaire, compromis avec le fascisme, qui a broyé les plus fragiles et permis à certains autres d’entrer par réaction dans la Résistance, l’autre guerre du titre, choisie, elle, et fondée sur un engagement éthique profond et cohérent.