“Séduite et abandonnée” (Sedotta e abbandonata) de Pietro Germi (1964) ressort en salles (copies neuves – 1h57). Ce film, caractéristique des comédies à l’italienne de l’époque, est une histoire d’honneur et de famille avec Stefania Sandrelli, Saro Urzi, Lando Buzzanca
Il fait chaud dans cette petite ville sicilienne. Toute la famille fait la sieste, y compris la fiancée dodue, moche et niaise que Peppino doit épouser. Il en profite pour se ruer sur Agnese, mince, belle et… mineure (Pietro Germi avait déjà utilisé l’impact érotique de Stefania Sandrelli dans Divorce à l’italienne). La mignonne tombe évidemment enceinte, et son père (Saro Urzi, sorte de Raimu tonitruant) somme le séducteur de réparer. Peppino regimbe : lui, un Sicilien, épouser une fille qui n’est pas vierge, ah non, alors ! « Tu l’aurais épousée, maman, si elle t’avait cédé avant le mariage ? » demande-t-il à son père. « Certainement pas ! » répond ce dernier… …..(Philippe Murat, Télérama, Samedi 26 juin 2010)
“Divorce à l’italienne”, le film précédent de Pietro Germi, avait été
couronné d’un succès national et international en 1961-62 et
récompensé pour son scénario. Seul le Sud de l’Italie avait boudé
le film : le public local n’appréciait guère l’ironie violente de
Germi à propos de thèmes aussi graves que le prétendu delitto
d’onore (le crime d’honneur) ou plutôt l’aberration juridique réelle
par laquelle le baron fictif Fefé Cefalù (Marcello Mastroianni)
tuait son immonde femme dans le but d’épouser la jeune et belle
Angela (Stefania Sandrelli), sans risquer de perdre sa liberté.
Trois ans plus tard, en 1964, Germi et son équipe revenaient avec “Séduite et Abandonnée”, traitant d’un thème similaire, pour le second volet de ce qui allait devenir avec “Ces messieurs dames”, sa trilogie sur l’Italie provinciale.
Sedotta e abbandonata, c’était une formule fort populaire dans la société italienne de cette époque pas si lointaine.
Une expression de la vie courante qui scellait le destin de tant de jeunes filles et qui permettait à leurs pères et frères de sauver l’«honneur» de la famille en se vengeant sur la «séduite», tandis que le «séducteur», lui, s’en tirait à bon compte en épousant la fille.
Comme le dit l’un des personnages du film : «Le mariage efface tout, bien mieux qu’une amnistie».
C’est le sujet le plus évident de l’oeuvre mais dans de nombreuses déclarations recueillies par le critique italien Orio Caldiron, Germi disait s’attaquer à quelque chose de plus complexe : «l’existence d’une disposition du Code italien, stupide et anachronique, selon laquelle un homme qui viole une jeune fille doit aller en prison sauf s’il se marie avec elle.»
Séduite? Séduit?
La Rédaction