De la Cinémathèque française au Jeu de Paume, en passant par l’Istituto italiano di Cultura, à Paris, la saison est FELLINIENNE.
L’exposition du Jeu de Paume, « Fellini, La Grande Parade », jusqu’au 17 janvier 2010, tente de retracer son parcours et d’expliquer l’inexplicable : le génie d’un créateur !
Ou, comment le jovial provincial de Rimini qui débarque à Rome à l’âge de 19 ans, devient l’un des plus fameux cinéastes du XX siècle, après avoir tâté du journalisme.
Son talent et son goût pour la caricature qu’il exerce non seulement dans les périodiques populaires mais également dans une petite boutique « Funny Face Shop » où il croque tous ceux qui veulent bien se laisser portraiturer et surtout les GI (nous sommes en 1944) se retrouvent dans ses films :
« Son rapport au dessin, c’est la caricature. Son cinéma aussi, c’est une manière de camper à travers une petite séquence, une anecdote, une situation. On ne peut pas résumer son cinéma à un adjectif, mais c’est aussi un cinéma de la caricature » (Sam Stourdzé, commissaire de l’exposition).
Federico Fellini, 8 ½, 1963,
©David Secchiaroli
Après avoir écrit des sketches pour la radio où il rencontre Giulietta Massina, Federico Fellini collabore avec Rossellini ( « Rome, ville ouverte », « Païsa » , « Miracle », dans lequel il tient même un rôle) . Il réalise « Les feux du music-hall » avec Lattuada en 1950, puis « Le Cheik blanc en 1952 » inspiré des romans photos très en vogue à l’époque.
En 1954 il reçoit le Lion d’argent à Venise et l’Oscar du meilleur film étranger pour » La Strada ». Il a alors 34 ans, sa carrière est lancée sur la voie du succès.
Federico Fellini, mars 1955,
©Collection particulière
Dans les années soixante, il découvre Jung et entame une psychanalyse. Dès lors et jusqu’en 1990, il dessinera ses rêves sur deux grands cahiers présentés dans l’exposition.
Rêves qu’il met en scène dans ses films, artisans de sa propre légende et qui sont récurrents dans son œuvre comme le cirque, le music-hall, les femmes (la maman et la putain), l’enfance, obsessionnellement filmés, dans le vacarme d’une loufoquerie visuelle et cette fameuse démesure si « fellinienne ».
Federico Fellini, dessin.
On lui doit, d’ailleurs, ces expressions passées dans le langage populaire :
Fellinien pour désigner ce qui est hors norme, caricatural.
Dolce Vita, après que le film éponyme (palme d’or à Cannes en 1961), ait suscité la hargne des ligues de vertu et de l’église ;
Paparazzi : le photographe qui suit Mastroianni dans cette même « Dolce Vita « nommé paparrazo a ainsi donné son nom à une profession .
Les photographes à l’arrivée de la vedette de cinéma,
La Dolce Vita, 1960,
©Collection Christoph Schifferli, Zü.
La Dolce Vita est inspirée de la vie romaine et des faits divers qui font la une des journaux à scandale de l’époque.
Anita Ekberg et Marcello Mastroianni,
La Dolce Vita, 1960,
©Collection Fondation Jérôme Seydoux-Pathé
Mastroianni campe un réalisateur en mal d’inspiration dans 8 ½ et bien qu’il s’en défende, il est son double à l’écran.
Marcello Mastroianni, 8 ½, 1963,
©David Secchiaroli
Avec son premier film en couleur « Juliette des Esprits » (1965), un de ses plus beaux films injustement méconnu, son cinéma devient de plus en plus introspectif et autobiographique.
L’univers baroque du maestro n’aura désormais plus de limites.
Sa fascination pour le monstrueux, les faciès grotesques venus de la Commedia dell’ Arte, les gros culs et les gros nichons, les trognes impossibles le poussent à rencontrer tous ceux qui le souhaitent au célèbre Studio 5 de Cinecittà, transformé en cour des miracles.
L’exposition présente ainsi toute une série de portraits de sosies et de
« castings » répertoriés « Gueules ignobles » , « Filles girondes et un peu putes »….qui lèvent le voile sur la fantaisie créatrice de cet artisan mythique.
Malgré les nombreuses photos, coupures de presse, extraits de films, on reste sur sa faim. Pas assez de folie dans la présentation de cette œuvre unique.
Le cinéma a-t-il sa place au musée ?
Il faut sans tarder courir à la Cinémathèque voir ou revoir tous ces chefs-d’œuvre avec une préférence pour les films en noir et blanc et ceux qu’il réalisa jusqu’aux années 80 .
Programme des projections
Indispensable le coffret « Fellini au travail », interviews, making-off, témoignages donnent une vision plus précise et inédite de l’envers du décor et de l’univers extravagant et satirique du créateur. Edité par CARLOTTA, qui ressort pour l’occasion : « Casanova »,
« Boccace 70 », « Juliette des esprits » et « Il Bidone » repris en salles à partir du 28 octobre .
Un cycle « Caro Fellini » à l’ Istituto Italiano di Cultura propose une série de conférences et concerts et une table ronde le 3 décembre avec, entre autres, Jean A. Gili, Aldo Tassone, Dante Ferretti : Fellini, le magicien du réel.
Parmi les nombreux ouvrages qui célèbrent le maestro
on retiendra :
FEDERICO FELLINI
Le livre de mes rêves
Paris, Flammarion2007
Edition en un seul volume des deux livres manuscrits conservés à la Fondazione Federico Fellini de Rimini.
La biographie de référence de
TULLIO KEZICH
Federico Fellini : sa vie et ses films
Paris, Gallimard 2007
JEAN A. GILI
Federico Fellini: Le magicien du réel
Découvertes Gallimard
Nouveauté Serie Arts n°549
EVVIVA FELLINI!
Marie Sorel