Depuis sa mort en 2010, à Paris où il résidait une partie de l’année, aucune exposition n’a été consacrée au peintre italien Leonardo Cremonini, né à Bologne en 1925. Jusqu’au 23 décembre, au 24 rue Beaubourg dans le 3e, la Galerie T&L comble ce vide en organisant une rétrospective réunissant une cinquantaine de ses œuvres (peintures, aquarelles, dessins) couvrant toute sa carrière, en insistant sur sa période phare, les années 1960 et 1970. Couleurs acidulées, atmosphères estivales, plages, scènes d’intérieur vues au travers de fenêtres ou jeux de miroirs, on prend grand plaisir à contempler ses œuvres.
Peintre emblématique des scènes artistiques française et italienne des années 1950 à 1990, Leonardo Cremonini (1925-2010) connut la célébrité de son vivant, … mais reste assez méconnu du grand public. Admiré par ses pairs tels que Francis Bacon ou Roberto Matta et par les écrivains, à l’instar d’Alberto Moravia, Italo Calvino, Umberto Eco, Louis Althusser, Michel Butor ou Régis Debray, son œuvre est représentée dans de nombreuses collections publiques (Musée national d’art moderne, Musée d’art moderne de la Ville de Paris, MoMa, Galerie d’art moderne de Milan…) et privées (Fondation William Louis-Dreyfus).
Lié aux artistes de la Figuration Narrative dont son style se départit pourtant, il a été élève de Giorgio Morandi à Bologne, avant de s’installer à Venise, où il est remarqué par Peggy Gugenheim. Dans les années 1950, alors qu’il s’installe à Paris, il travaille dans une veine expressionniste suscitant l’intérêt (ses premières expositions à New York ont lieu à cette époque) mais qui évolue dans les années 1960 vers une peinture plus construite, intellectuelle, au goût métaphysique et aux couleurs puissantes.
Attiré par les ambiances balnéaires de son enfance italienne, Cremonini représente estivants hébétés sur les plages, enfants jouant et couples inconsolés qu’il décline en autant de situations dramatiques qu’elles sont banales. Ce dramatique sans drame, il le figure avec une peinture au chromatisme exacerbé, captant parfaitement l’atmosphère lourde et embuée de la chaleur d’été. Il joue sur des cadrages géométriques, très construits, employant des formats souvent oblongs ou utilisant les jeux de reflets de miroirs, les plans en enfilade d’une pièce à l’autre, qui dilatent et déforment l’espace. Pour ses personnages, il met au point un canon humain qu’il contorsionne et rabougrit. Ses tableaux évoquent la puissance du désir, ses jeux, ses interdits ; sa peinture dépeint également admirablement l’ennui, l’abandon, l’incompréhension – des rapports émotifs sur lesquels on ne parvient à mettre de nom mais dont on sent la prégnance.
(T. Hertzog)
L’EXPOSITION
Sur 280 mètres carrés au 24 rue Beaubourg, dans le Marais, l’exposition réunit une cinquantaine d’oeuvres, entre tableaux et aquarelles, datant des années 1950 à 2008 et retraçant toute la riche carrière de l’artiste. Plusieurs grands chefs-d’oeuvre, rarement vus ces dernières années, ainsi que des inédits sont présentés dans cette rétrospective-hommage.
Un catalogue de 150 pages est publié par la galerie à l’occasion de l’exposition réunissant des essais de Jean-Jacques Aillagon et Tancrède Hertzog ainsi qu’un entretien inédit entre Leonardo Cremonini et Gérard Louis-Dreyfus.
Cette première exposition parisienne contribue ainsi au mouvement de redécouverte de son œuvre initié par les récentes expositions organisées en 2016 à New York (avec les œuvres de la Fondation Louis-Dreyfus) et à Athènes (au Hydra Museum).
Evolena
LEONARDO CREMONINI 1925-2010
Exposition du 30 novembre au 23 décembre 2017
Ouvert du mardi au samedi de 13h à 19h
24 rue Beaubourg
75003 Paris